vendredi 30 octobre 2009

l'entreprise esclave

vers quoi pourrait aboutir l'évolution de la notion de propriété.


Apparemment, la propriété fonde la civilisation. Sortie de la protection collective de la structure clanique ancestrale, l'humain a vite compris que si l'abondance de bien ne faisait pas forcément le bonheur, le dénuement subi était la pire calamité qu'il puisse rencontrer.
Seuls deux mouvements ont voulu s'affranchir de la propriété: la religion, par une démarche individuelle et volontariste, d'une part, et la politique d'une manière autoritaire et collective. Les deux ont montré leurs limites.

Par contre, s'il semble que la propriété soit aussi incontournable qu'il y a quelques milliers d'années, ce que a considérablement changé c'est ce qui peut en faire l'objet et la limitation du pouvoir sur l'objet possédé. En fait, c'est la définition même de l'objet qui a changé.

Si aujourd'hui comme il y a trois mille ans, on peut toujours casser une assiette de colère ou revendre un outil, le champ d'exclusion de ce droit a heureusement évolué.

Dans l'antiquité, on considérait la possession d'êtres humains comme allant de soit. Qu'ils soient devenus objets par dette, conquête militaire ou filiation, l'objet humain, homme, femme, enfant, esclave, pouvait être vendu, exploité, torturé, tué au seul bon plaisir de son propriétaire. Ceci ne choquait personne et même un esprit ouvert comme celui d'Aristote ne le condamnait pas. Et pourtant, philosophes et religieux, siècles après siècles ont instillé dans les têtes que cette perception était malsaine, puis injuste, puis répréhensible, puis inadmissible. Et si aujourd'hui, il reste des poches de résistance, l'ensemble de l'humanité juge l'esclavage intolérable, juge qu'on ne peut ravaler l'homme au rang d'objet. C'est un sens indiscutable et irréversible de l'histoire.

A l'époque mérovingienne puis carolingienne, le roi considérait son royaume comme un bien propre dont il pouvait disposer comme d'un simple champ. A ce titre, chaque succession voyait l'édifice durement bâti par le précédent, séparé en autant d'héritiers. Cette perception de la propriété d'un royaume causa la perte et des mérovingiens et des carolingiens. Les derniers fonctionnaires impériaux de ces derniers, en s'appropriant dans une sorte de privatisation sauvage les entités territoriales qu'ils étaient supposés administrer ont retenu la leçon dans leur mise en place de la féodalité. Ils créèrent le droit d'ainesse. Mais ils continuaient de considérer leur fief comme une simple propriété. Encore une fois, les religieux, les philosophe et les tous nouveaux hommes politiques issus de la bourgeoisie croissante, instillèrent l'idée qu'un endroit où vivait plein de monde en commun ne pouvait se concevoir comme une vulgaire propriété. La notion d'état, mise en parenthèse depuis la fin de l'empire romain s'est imposée à nouveau. Malgré la volonté acharné des magnats actuels d'en finir avec les états pour nous replonger dans une néo-féodalité, on peut être rassuré malgré tout par ce sens de l'histoire.

Même chose pour la famille. Le pater familias romain pouvait tuer, vendre, faire ce qu'il voulait de sa femme et de ses descendants. Il y a encore un siècle, on considérait l'enfant comme un adulte en miniature qu'il convenait de dresser à sa volonté. Il y a encore à peine 60 ans, la femme était un mineur en politique, elle n'avait pas le droit de signature et le viol entre époux n'existait pas.

Idem pour les animaux. Il y a à peine quelques décennies, on pouvait impunément martyriser à loisir son chien, son chat, son cheval, son bétail. Aujourd'hui, c'est la correctionnelle et le déshonneur public.

Dans cinq siècles, dans mille ans, nos descendants ne nous considéreront-ils pas comme des arriérés abrutis d'avoir pu considérer qu'une entreprise, surtout une entreprise s'étendant sur plusieurs pays, conditionnant la vie de plusieurs dizaines de milliers de personnes et appartenant à une infinité d'inconnus puisse se concevoir comme une simple propriété privée?

P. Kerjean


PS: n'ayant pas de compteur, je serai reconnaissant à tout lecteur de laisser une trace de passage par un commentaire, même désobligeant. Même si ce n'est qu'une lettre, un chiffre ou un mot.
merci

18 commentaires:

  1. C’est accompagné de la Méditation de Thaïs que je passe vous voir ce soir… La lumière est allumée, mais je n’ose pas sonner. Le vent d’automne me glace et il me faut songer à m’abriter.
    Point d’éclaircie sur le chemin du temps ! l’Indigne s’obstine à dépouiller notre Histoire et ses loups nous traquent sans relâche.
    Savez-vous où se cache notre Espoir ? J’aimerais tant que mon pays me soit rendu…
    Voilà, je ne m’attarde pas et vous glisse sous votre porte ce petit mot de mélancolie, vous le trouverez pour votre comptage.

    mpH

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  2. @sans culotte
    Qui dit propriété dit pouvoir.
    Pouvoir de vendre, d'acheter, de détruire, de dominer.
    En effet, l'ascendance direct de l'homme sur d'autres hommes (esclavages), sur une partie du règne animal (partie bien faible cela dit)est aujourd'hui prohibée par les sociétés dites "civilisées"...
    Mais sachant que durant très longtemps, jusqu'au XVIII des Lumières sûrement, les sociétés humaines ressemblaient plutot à des collectifs (claniques comme vous dites), et l'idée de propriété n'etait en effet qu'une question de hierachisation des pouvoirs.
    Mais ce XVIII a changé cela et la propriété est devenue un principe de base du droit dans les sociétés occidentales. Cette acceptation recente de la propriété, et entre autres celle de l'objet et de son moyen de production (y compris bien sûr les hommes) n'est donc pas très ancienne, et j'ai bien peur que l'on ne doive attendre bien plus de mille ans avant de n'en être plus les esclaves, puisque nous autres hommes sommes avides intrinsequement et par atavisme de la proprieté synonyme d'abord de liberté puisque "le dénuement subi était la pire calamité qu'il puisse rencontrer".
    Ben oui, le "plus j'ai, plus je suis" n'est pas près de disparaitre.
    Je sais, chuis pas très optimiste........

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  3. Remarquez quand même ki y'a des fidèles au poste même à des heures indues

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  4. @Ram-freya

    Mouai.
    Faut dire qu'il y en a qui fume leur clope après et d'autres qui viennent sur internet...hmmm?

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  5. @MPH

    faut dire qu'il n'y a pas trop de chauffage non plus ici. Votre visite réchauffe un peu.

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  6. ..les deux ne sont pas incompatibles..

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  7. Est-ce cet outil qui vous fait défaut ?
    http://www.compteur-gratuit.fr/

    Peut-être trouverez-vous votre bonheur sur cette page…
    Vous m’en donnerez des nouvelles !

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  8. @mpH

    génial, par contre, béotien que je suis, je ne sais pas comment on "insère le code dans la page".

    Si vous pouvez me donner le mode d'emploi, ce serait top

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  9. Il me semble que dans la construction de votre blog, il devrait y avoir une option faisant référence à la mise en place d’un compteur. Dans ce cas, il vous faut suivre les instructions (de votre blog) pour pouvoir insérer le code que vous avez choisi.
    Mais l’un de vos membres ne serait-il pas plus doué que nous pour ce type de manipulation… ?

    Béotiennement vôtre

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  10. "Dans cinq siècles, dans mille ans, nos descendants ne nous considéreront-ils pas comme des arriérés abrutis d'avoir pu considérer qu'une entreprise, surtout une entreprise s'étendant sur plusieurs pays, conditionnant la vie de plusieurs dizaines de milliers de personnes et appartenant à une infinité d'inconnus puisse se concevoir comme une simple propriété privée?"
    Je ne suis pas certain que ce type de proprietes soient concues comme une propriete privee. D'ailleurs les grosses entreprises ressemblent davantage a un monopole transnational dont les proprietaires ne sont pas tres clairement definis. Et puis se projeter dans l'avenir est un esxercice des plus perilleux. Ne devrions-nous pas etre tous egyptiens, si ... ?

    "PS: n'ayant pas de compteur, je serai reconnaissant à tout lecteur de laisser une trace de passage par un commentaire, même désobligeant. Même si ce n'est qu'une lettre, un chiffre ou un mot.
    merci"
    Il existe certainement des compteurs de visite gratuit pour ton blog.
    Par exemple ici :
    http://compteurs-pour-blog.blogoutils.com/

    Dans tous les cas, tu as un petit morceau de programme a charger quelque part dans ta page de blog. La faut voir avec l'administration de ton blog.

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  11. Refrain bien connu, c'est toujours la faute de quelque chose quand un concept est detourne pour un usage moins noble, car l'humain est par definition infaillible. Comme le dit Arie, la propriete, c'est l'alienation de l'homme. Il n'a jamais repondu a ma question de savoir dans quel HLM du 9-3 il avait elu domicile avec sa femme !!!
    D'ailleurs, en droit prive, on parle de limites de propriete ... C'est meme un cas ou faut etre borne !!!

    Mon cher Pierre, ici aussi ca peut t'interesser :
    http://www.compteur2visite.com/

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  12. Je ne sais pas comment je dois prendre le dernier mot de confirmation que j'ai du entrer pour valider mon commentaire : crusche. Meme avec un "s" supplementaire ...!!!

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  13. parce que tu parles encore avec arié toi?

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  14. Mais je retrouve des amis en plus de Kerjean !
    Ram, Donald11...

    Je reviendrai !!!



    la p'tite fourmi rouge qui pique

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  15. "parce que tu parles encore avec arié toi?"
    Non c'etait dans le temps, ca !!! Mais ma memoire est encore vivante ...

    Bonjour la p'tite fourmi ...

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  16. ..avec toutes ces adresses, j'espère que notre sans culotte va nous faire un compte rendu du nombre vertinigeusement croissant de visiteurs de ce site...

    à ce propos, heureuse de voir les antennes d'une petite fourmi rouge passer la porte et venir nous chatouiller....un grand salut à elle.

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